Avec l’annonce des résultats définitifs des élections législatives anticipées en Irak, les interrogations se multiplient concernant les éventuels candidats éligibles pour occuper les hauts postes au sein de l’appareil de l’Etat, s’agissant notamment des présidents de la République et du Parlement et du Chef du gouvernement.
Depuis la chute du régime de Saddam Hussein en 2003 après l’intervention des Etats-Unis d’Amérique, les postes supérieurs en Irak sont partagés entre les composantes fondamentales en Irak, suivant en cela une coutume politique (non formalisée dans la constitution), appelée localement « Système des quotas ».
En vertu de cette coutume politique, les Chiites occupent la présidence du gouvernement, les Sunnites celle du Parlement tandis que la présidence de la République échoit aux Kurdes.
Le président de la République est élu aux voix des deux tiers des membres du Parlement (qui compte 329 députés) et le mandat du président est de quatre ans.
– Les chances de Barham Salih
La compétition pour l’obtention du poste de président de la République se limite entre les deux partis au pouvoir dans la région du Kurdistan (dans le nord de l’Irak). Il s’agit du PDK présidé par Massoud Barzani et l’UPK dirigé par Bafel Talabani.
L’actuel président irakien, Barham Salih, est l’un des principaux dirigeants de l’UPK et un des candidats éventuels pour rempiler et être reconduit dans son poste.
L’analyste politique Doureid Ennacer, a, toutefois, déclaré à l’Agence Anadolu, que « Barham Salih ne dispose d’aucune chance pour obtenir un deuxième mandat ».
Et Ennacer de poursuivre : « Les nouveaux dirigeants de l’UPK ne veulent pas renouveler pour Salih, dès lors que les relations entre les deux parties sont désormais inamicales ».
« Le poste de la présidence de la République ne sortira pas des mains du PDK, qui s’emploie à obtenir ce poste au cours du prochain mandat », a-t-il ajouté.
Au sujet des éventuels candidats que pourrait présenter le PDK pour occuper ce poste, Ennacer a souligné que le « parti présentera la candidature de l’actuel ministre des Affaires étrangères Fuad Hussein, et de l’ancien chef de la diplomatie Hoshyar Zebari, ainsi que de l’ancien président du Parlement de la région du Kurdistan, Adnan Mufti ».
L’UPK occupe le poste de la présidence de la République depuis l’organisation des premières élections pluralistes en Irak en 2005.
Le chef du PDK disparu, Jalal Talabani, avait occupé le poste de président du pays pour deux mandats successifs, entre 2005 et 2014, suivi du dirigeant du parti, Fuad Maasoum (2014-2018) et de l’actuel chef de l’Etat, Barham Salah depuis 2018.
En contrepartie, le PDK occupe les postes de la présidence de la région du Kurdistan et celle du gouvernement en vertu d’un accord implicite être les deux partis pour partager les postes supérieurs.
Le PDK s’emploie cette fois-ci à décrocher le poste de la présidence de l’Irak, motivé et fort en cela par son obtention d’un plus grand nombre de sièges aux élections parlementaires qui se sont déroulées le 20 octobre dernier, et en profitant des dissensions internes qui minent les rangs de son partenaire, l’UPK.
Le PDK a obtenu 31 sièges selon les résultats définitifs contre 25 sièges aux élections de 2018, tandis que l’UPK en a obtenu 17, soit un résultat similaire à celui de 2018.
– Les dissensions de l’UPK
Depuis plusieurs mois, l’UPK souffre de dissensions internes aigues entre ses dirigeants. Ces dissensions ont abouti à démettre le co-président du Parti, Lahor Jenki.
Selon le dirigeant du PDK, Abdessalem Berouari, « les forces politiques irakiennes qui ont soutenu le candidat de l’UPK (Barham Salih) ne disposent pas du même poids politique que celui lors des dernières élections ».
Berouari relève, dans une entretien accordé à AA, que l’Alliance al-Fath, un parapluie politique de plusieurs factions chiites proches de l’Iran, a perdu de nombreux sièges lors des élections anticipées en obtenant 17 sièges seulement, alors que cette alliance était classée deuxième aux élections de 2018 avec 48 députés.
De son côté, le Courant Sadriste du leader chiite Moqtada Sadr a été victorieux lors des dernières élections, fort de 73 sièges.
Berouari a ajouté que « la candidature d’une quelconque personnalité de la part des Kurdes est liée à la conclusion d’un accord avec les forces politiques à Bagdad ».
Le dirigeant politique a considéré que « cette question qui se pose l’a été très tôt au vu des différends entre les chiites concernant la présidence et la forme du prochain gouvernement ».
– La Présidence du gouvernement et la forme du cabinet
Le Courant sadriste s’emploie à former un gouvernement de majorité et non pas consensuel, et ce pour la première fois depuis 2005. Toutefois, sa démarche fait face au rejet des autres forces et courants chiites qui ont perdu un grand nombre de sièges et qui rejettent ces élections, prétextant leur falsification.
Depuis mi-octobre dernier, les sympathisants des forces défaites manifestent dans le centre de la capitale Bagdad sur fond d’une ambiance politique tendue ponctuée d’une tentative d’assassinat du Premier ministre Mustafa al-Kazimi, le 7 novembre dernier.
L’opération de recomptage manuel des votes dans les bureaux contestés a abouti au changement de 5 sièges seulement.
Le président du Centre médiatique pour le développement des médias (basé à Bagdad), Adnan Sarraj, a déclaré à AA : « Nous constatons une temporisation de la part du PDK pour dévoiler les noms de ses candidats au poste de président de la République ».
Sarraj a souligné que les « Kurdes attendent la résolution des problèmes et des alliances à Bagdad avant de soumettre les noms de leurs candidats à la présidence de la République ».
Concernant l’éventualité du maintien de Barham Salih, Sarraj a estimé improbable un deuxième mandat du président sortant pour de nombreuses raisons, notamment, les dissensions internes au sein de l’UPK ».
« De même, le PDK a commencé à exercer des pressions pour obtenir ce poste au cours du prochain mandat et ne soutient pas un deuxième mandat de Salih à la Présidence », a conclu Sarraj.
AA