La dernière action du président de la République a fait réagir et suscité les interrogations et même l’indignation de certains observateurs et experts. Kaïs Saïed s’est déplacé dans la soirée de samedi 28 août dans une usine sidérurgique à Zaghouan où près de 30 mille tonnes de fer ont été saisis par des unités de la Garde nationale et l’équipe de contrôle relevant du ministère du Commerce. Une action qui s’inscrit dans le cadre de la lutte contre la spéculation, précise la présidence de la République, alors qu’une pénurie sans précédent touche le marché.
L’ancienne députée Sabrine Ghoubantini s’est étonnée de voir le président faire une « descente » de cette manière dans l’une des plus grandes usines du secteur en Tunisie. Elle s’est notamment interrogée si stocker des produits est devenu un problème. Citant des experts, Ghoubantini relève que le stock habituel est de 60 jours de production et que la quantité saisie dans l’usine ne dépasse pas cette quantité. « Qui conseille le président de la République ? Je pense qu’on l’induit en erreur ».
Le président serait-il mené en bateau comme l’indiquent plusieurs observateurs ? Selon des experts du secteur, l’unité en question a une capacité de production de 300 mille tonnes par an. Ainsi, la marchandise saisie correspond à 36 jours de stock ce qui ne dépasse pas les normes (60j) et de fait ne pourrait être considéré comme de la spéculation. Par ailleurs, les stocks sont nécessaires pour fluidifier la chaine logistique. Certains ont crié au scandale condamnant l’attitude même du chef de l’Etat qui pourrait nuire au tissu économique et d’investissement. Pour nuancer, d’autres expliquent que l’état des stocks dépend fortement de l’offre et de la demande, qu’en ce moment le marché est fortement demandeur et que des industriels freinent l’approvisionnement pour négocier une hausse des prix alors que la pénurie a atteint des sommets.
Réagissant à la polémique et aux échanges tendus entre les critiques de Saïed et ses soutiens inconditionnels, s’étant tous improvisés experts en sidérurgie, Tarek Kahlaoui a appelé au retour à la raison et surtout à se poser les bonnes questions.
« Est-ce que le président a effectué la saisie ? Non, ce sont les services du ministère du Commerce. Donc, pour éviter toute cette confusion, il est nécessaire que le département publie un communiqué pour préciser si l’usine de sidérurgie a le droit de stocker 30 mille tonnes depuis le mois de juillet, alors que le marché est fortement demandeur et que des milliers d’emplois sont menacés dans le secteur du bâtiment. La guerre contre la spéculation et le monopole doit passer par les institutions sinon elle sera considérée comme circonstancielle et chaotique. Qu’une guerre contre le monopole soit menée est une bonne chose mais il faut qu’il y ait une transparence totale parce que la moindre erreur affectera la crédibilité de cette guerre, les corrompus en profiteront pour se blanchir et les hommes d’affaires honnêtes en seront les victimes ».
Il est clair que les actions du chef de l’Etat manquent de transparence et qu’il existe un réel problème de communication. Une situation qui ne fait que susciter les inquiétudes, surtout que le flou politique se poursuit depuis le 25 juillet.
businessnews