Une semaine après le séisme de 5.9 du 18 mars les répliques continuent de frapper à Béjaïa et d’effrayer la population, dont une partie vit dans une angoisse perpétuelle. Les répliques, qui sont survenues dans la nuit de mercredi à jeudi derniers, dont deux de magnitude menaçante de 4.3, ont été suffisamment fortes pour exacerber la tension qui était déjà perceptible dans la rue.
Des dizaines d’habitants de l’ancienne ville, là où se concentre le vieux bâti qui a subi le plus de dégâts du tremblement, se sont rassemblés devant le siège de la wilaya, dès 1h, pour protester contre l’absence de relogement des sinistrés et la non-assistance à des familles qui risquent de voir tomber leurs toits sur leurs têtes.
Une semaine après le séisme, aucune famille n’a été relogée, malgré la menace incessante des répliques. Dans la même nuit de mercredi à jeudi, des rues ont été fermées à la circulation par divers objets dont le contenu de bacs à ordures que l’on a vidés sur la chaussée, au moment où de l’autre côté de la ville des dizaines de voitures ont envahi le parking du stade de l’Unité maghrébine transportant des familles paniquées et fuyant leurs logements après la première réplique de minuit.
La manifestation de rue grossissait devant le siège de la wilaya, où la panique s’est mélangée à la colère pour donner un mélange détonnant. Un jeune citoyen désespéré, perché sur le porche du siège, a menacé de s’immoler par le feu. Un autre a monté une tente individuelle pour passer la nuit sur les lieux, avec plusieurs autres citoyens.
La tension a été plus vive avec l’arrivée, jeudi, de trois ministres, de l’Habitat, des Ressources en eaux et de l’Energie, pour une visite d’inspection des chantiers de logements dans le nouveau pôle urbain d’Ighzer Ouzarif, à Oued Ghir. Pour attirer l’attention des représentants du gouvernement sur leur désarroi, des manifestants se sont précipités vers la route de l’aéroport, qu’ils ont aussi barricadée pour empêcher la délégation ministérielle de passer à son retour. Dans la foulée, le président de l’APC de Béjaïa a été pris à partie par quelques manifestants hors d’eux qui ont crié leur colère d’avoir été « abandonnés à leur sort». Parmi ceux-ci, se trouvent les citoyens du plateau Amimoune, du quartier Soumari, de la rue Fatima et de tant d’autres, dont les habitations, dont certaines datent de près d’un siècle, s’effritent sous l’usure impitoyable du temps. Certaines ont été classées zone rouge lors du séisme survenu en 2012. Et elles le sont à ce jour.
Les sinistrés de 2012 ont été relogés à Saket, dans un camp familial dépendant du patrimoine communal. Ils y sont toujours. La semaine dernière, ils ont protesté devant le siège de la wilaya contre les conditions de vie dans ce qui s’apparente être du provisoire qui dure. Le séisme du 18 mars et son corollaire de répliques ont mis en danger une douzaine de familles dans la haute ville, tandis que des dizaines d’autres habitations sont menacées d’effondrement si les fortes répliques, comme celles de jeudi, continuent à sévir. « Un toit, c’est notre droit constitutionnel !» ont réclamé les manifestants au ministre de l’Habitat.
Des engagements pour Ighzer Ouzarif
Jusqu’à hier, pour seule prise en charge des sinistrés, le directeur du logement a annoncé des aides financières de 200 000 DA, 400 000 DA et 700 000 DA, décidées pour la réparation des logements endommagés et classés entre vert, orange 3 et orange 4. Les constructions expertisées « rouge » sont à démolir et leurs occupants à reloger au plus vite. Mais le caractère urgent de l’opération court depuis plus d’une semaine. C’est surtout le retard dans leur relogement qui a fait monter la tension. Les autorités se sont engagées à leur établir des décisions de pré-affectation dans les heures qui viennent.
En tout, 1700 constructions, dont 600 logements individuels, ont été expertisées par le CTC. 2900 sont classées rouge ou orange. A ces chiffres s’ajoutent celui de 37 équipements publics, dont des établissements scolaires, fragilisés. Des entreprises privées ont été engagées pour la réparation de ces établissements. Sur plus de 22 écoles, collèges et lycées endommagés, sept ont été réhabilités jusqu’à hier, ce qui risque de retarder encore la rentrée pour des centaines d’élèves, qui n’ont pas pu reprendre leurs cours après la fin des vacances de deux semaines.
La colère des citoyens a été d’autant plus vive que des dizaines de logements finis dans quelques endroits de la ville n’ont pas été attribués. Les regards sont aussi tournés vers le nouveau pôle urbain d’Oued Ghir, où 16 000 logements y sont construits, mais accusent un grand retard pour leur réception, plombée par d’innombrables obstacles. Des mesures d’urgence, dont des réductions de délais, ont été prises à la faveur de la visite ministérielle d’avant-hier pour pouvoir réceptionner 5000 unités dans les jours qui viennent.
Selon le ministre de l’Energie, le site sera doté « provisoirement » en électricité dans 15 jours « après la levée des obstacles techniques », et en gaz dans deux à trois mois. Par contre, « l’eau sera dans les robinets lundi ou mardi prochains », à en croire la promesse du ministre de l’Habitat. La distribution de 5000 à 7000 logements est donc attendue pour les deux prochains mois, soit à la veille des prochaines élection ns. Pour le branlant et vieux bâti, ce sera une autre « procédure