Des Arméniens ont défilé, des bougies et des fleurs à la main, à Erevan pour commémorer le 106ème anniversaire de génocide perpétrés par l’Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale.
La foule s’est rendue depuis le centre-ville de la capitale jusqu’au mémorial dédié aux victimes du génocide, un terme toujours rejeté avec véhémence par la Turquie.
Des militaires, des dignitaires religieux, des femmes avec des enfants et des responsables du pays, dont le Premier ministre Nikol Pachinian, sont venus se recueillir près de ce mémorial surplombant Erevan, comme c’est la tradition en Arménie tous les 24 avril, jour du début des massacres en 1915.
Le chef de l’Eglise arménienne, le catholicos Karékine II, a célébré une messe de requiem près du mémorial.
Samedi, le président américain Joe Biden devrait reconnaître ces massacres d’Arméniens comme un génocide, un geste qui risque d’aggraver davantage les tensions entre Washington et Ankara, membre de l’Otan.
En ce 106ème anniversaire, mes pensées toutes entières vont à l’Arménie meurtrie par l’histoire (…). Nous n’oublierons jamais”, a déclaré pour sa part le président français Emmanuel Macron, dans un message à son homologue arménien Armen Sarkissian, publié vendredi par la présidence arménienne.
- Macron s’est recueilli samedi devant le mémorial du génocide arménien à Paris.
Selon les estimations, entre 1,2 million et 1,5 million d’Arméniens ont été tués par l’Empire ottoman.
Mais Ankara refuse l’utilisation du terme “génocide” et récuse toute velléité d’extermination, évoquant des massacres réciproques sur fond de guerre civile et de famine ayant fait des centaines de milliers de morts dans les deux camps.
La colère des Arméniens contre la Turquie ne fait que monter depuis la défaite de l’Arménie cet automne dans la région séparatiste du Nagorny-Karabakh, face à l’Azerbaïdjan soutenu par la Turquie.
Le Premier ministre arménien a qualifié ce conflit qui a éclaté en septembre et s’est terminé six semaines plus tard, après par un cessez-le-feu signé en vertu d’une médiation de la Russie, d'”agression azerbaïdjano-turque visant à anéantir la trace arménienne” au Karabakh.
“Idéologie génocidaire”
“La politique étrangère expansionniste de la Turquie et ses aspirations territoriales à l’égard de l’Arménie sont une preuve de la renaissance de leur idéologie génocidaire”, a affirmé M. Pachinian dans un communiqué publié samedi matin. “L’Arménophobie est l’essence du panturquisme, et aujourd’hui nous pouvons voir ses manifestations les plus dégoûtantes en Azerbaïdjan”, a-t-il ajouté.
Armé par la Turquie, l’Azerbaïdjan a infligé en automne une défaite humiliante à l’Arménie qui avait vaincu les forces de Bakou lors d’une première guerre dans les années 1990. L’Arménie a ainsi dû céder d’importants territoires au Nagorny-Karabakh qu’elle avait contrôlé depuis des décennies, en vertu d’un cessez-le-feu négocié sous l’égide de Moscou qui a déployé ses soldats de maintien de la paix dans la région.
Durant la guerre, l’Arménie a accusé la Turquie d’être impliquée directement dans les combats, et d’avoir acheminé des mercenaires étrangers, ce qu’Ankara dément. Plusieurs pays dont la France ont également dénoncé l’envoi aux côtés des forces azerbaïdjanaises de combattants pro-turcs venus de Syrie.
“La vieille plaie s’est rouverte et saigne de nouveau”, dit à l’AFP Sonik Petrossian, une retraitée de 72 ans, en se souvenant de cette dernière guerre de six semaines qui a fait plus de 6 000 morts des deux côtés. “Les Arméniens doivent rester unis pour que le pays puisse surmonter ces difficultés”, estime-t-elle en déposant des fleurs près du mémorial aux victimes des massacres.