Certains l’avaient annoncé fini lorsque, en septembre 2020, il a cédé son poste d’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles à Mohamed Hanèche. Le départ de Amar Belani de la capitale européenne avait été particulièrement applaudi par la presse marocaine.
« Amar Belani n’est plus ambassadeur d’Algérie à Bruxelles et auprès de l’Union européenne. Ses écrits et autres envolées verbales contre le Maroc n’ont finalement pas permis à cet ambassadeur de se maintenir à son poste. Une sanction terrible qui risque de pousser l’intéressé au hrig », écrivait par exemple le site Le360.ma, réputé proche du palais royal.
C’est que, au fil des années, notamment lorsqu’il a été porte-parole du ministère algérien des Affaires étrangères et surtout depuis sa nomination à Bruxelles en 2014, le diplomate s’est taillé une réputation de « bête noire » du régime marocain et de ses relais et pourfendeur de ses thèses sur le dossier du Sahara occidental.
Ce même journal qui a jubilé à l’annonce de son départ, Belani l’a qualifié en mai dernier de « rejeton adultérin » de l’agence officielle de presse marocaine (MAP) et d’ « incubateur de Fake news animé par de piètres barbouzes aux ordres du secrétaire particulier du souverain qui cultive, avec une rare virulence, la haine de l’Algérie et de ses institutions ».
La jubilation du site marocain se comprend, mais elle sera de courte durée. Moins d’une année après son remplacement au poste d’ambassadeur d’Algérie auprès de l’Union européenne, Amar Belani est nommé « monsieur » Maghreb et Sahara occidental.
Dans le cadre des efforts pour donner un nouveau souffle à la diplomatie à l’Algérienne, le président de la République Abdelmadjid Tebboune a décidé de créer des postes d’envoyés spéciaux chargés chacun d’un dossier qu’il connaît bien.
Ils exerceront sous l’autorité du ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra. Ahmed Benyamina, Boudjemaa Delmi, Taos Haddadi-Djellouli, Abdelkrim Harchaoui, Nor-Eddine Aouam, Leila Zerrougui et Amar Belani sont tous des diplomates chevronnés.
Ce dernier a logiquement hérité du dossier du Sahara occidental et des pays du Maghreb. Logiquement, car de tous les diplomates algériens, Belani est peut-être celui qui s’est exprimé le plus sur la question sahraouie et les relations avec le Maroc ces dernières années.
Sa présence pendant six ans à Bruxelles, où se jouait une partie du conflit, et non loin de Luxembourg qui abrite le siège de la Cour de justice européenne, l’a amené à s’exprimer régulièrement sur le dossier, dans un style qui tranche parfois avec la réserve diplomatique.
Sur la question précise du conflit au Sahara occidental, il est considéré comme un partisan de la ligne dure vis-à-vis du Maroc et défenseur acharné de la position de l’Algérie et du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Dans ce contexte de graves tensions avec le Maroc qui ont débouché sur la mesure extrême de rupture des relations diplomatiques, prise par l’Algérie le 24 août dernier, Amar Belani est incontestablement l’homme de la situation.
Non seulement il maîtrise le dossier du Maroc et des relations intermaghrébines, mais son intransigeance cadre parfaitement avec le nouveau cap de fermeté pris par l’Algérie vis-à-vis des « actes hostiles » et autres provocations marocaines.
Ses dernières déclarations ne le démentent pas. Alors que des spéculations commencent à prendre de l’épaisseur sur des médiations arabes pour désamorcer la crise entre les deux pays, Belani y est allé de son avis, en sa qualité d’ancien diplomate. Il n’y aura ni médiation ni arrangement avec le Maroc ».
Un avis tranché comme il en a l’habitude d’en émettre à chaque épisode ou étape dans le conflit du Sahara occidental ou des relations algéro-marocaines. Brillant diplomate, Amar Belani a les idées claires et le sens de la réplique et le verbe acéré. Nasser Bourita, le ministre marocain des Affaires étrangères ? « Un ministre hâbleur et prétentieux, dont le seul fait d’armes est de pouvoir compter sur l’influence du lobby juif à Washington tout comme au Parlement européen. »
Omar Hilale, l’homme à l’origine du casus belli qui a provoqué la rupture des relations ? « Un cuistre insolent en costume de diplomate », ou encore « Coué retors et besogneux de la diplomatie marocaine ».
Ceux qui, au Maroc, avaient conclu en septembre 2020 que « les diplomates remplacés (dont Amar Belani) semblent pour la plupart avoir subi les foudres du pouvoir algérien qui leur reprocherait un manque d’efficacité dans la gestion de certains dossiers considérés comme stratégiques », se sont lourdement trompés…