Riad Salamé, gouverneur de la Banque du Liban (BDL), n’arrête pas de faire parler de lui. Selon le quotidien libanais Al Akhbar, les douanes françaises ont découvert dans ses valises, le 16 août, alors qu’il se rendait à Paris, quelque 83 000 euros en liquide, en plus de l’équivalent en dollars de 7 000 euros, sans compter… 50 cigares !
D’après le quotidien libanais, Riad Salamé, qui avait pris un avion privé de Beyrouth vers l’aéroport du Bourget, à une dizaine de kilomètres au nord de Paris, avait déclaré aux douanes françaises à son arrivée qu’il n’avait dans ses bagages que 15 000 euros, soit la somme maximale autorisée en liquide.
Mais les douaniers, dans le doute, ont préféré fouiller les valises du gouverneur de la Banque du Liban et ont découvert un montant beaucoup plus important que celui déclaré. Dans un premier temps, Riad Salamé avait même nié transporter du liquide.
«Il a commencé par dire qu’il ne savait pas comment cet argent s’était retrouvé dans ses bagages, avant de reconnaître que la somme lui appartenait», rapporte Al Akhbar.
Le responsable libanais s’en sortira avec une amende de 2 700 euros et quittera l’aéroport du Bourget.
Cet épisode, rappelle le média libanais, intervient «alors que les Libanais et l’ensemble des dépositaires sont interdits de sortir le moindre euro ou dollar des banques libanaises, ruinées sous la direction de Riad Salamé».
Le même journal souligne que Riad Salamé a «menti» aussi bien aux douanes françaises qu’aux douanes de l’aéroport de départ, à Beyrouth.
Enfin, Al Akhbar rappelle que «ce qui s’est passé aurait dû être qualifié de scandale dans n’importe quel pays du monde», un «scandale» lié à «un responsable dont le rôle est central dans la dilapidation de milliards de dollars de fonds publics qui a précipité le Liban dans la pire crise monétaire et économique de son histoire».
Des enquêtes et des blocages
Mais surtout, Al Akhbar décèle un lien entre l’attitude des douaniers du Bourget et «l’orientation française» officielle vis-à-vis du gouverneur de la Banque du Liban.
«Paris souhaite faire tomber Riad Salamé – la France a beaucoup de candidats pour le remplacer, à commencer par Samir Assaf [un des dirigeants de HSBC] – mais ce qui bloque Emmanuel Macron, c’est la protection américaine dont bénéficie Salamé ainsi que le parapluie interne politique, financier, monopolistique, communautaire, médiatique et administratif qui le protège», explique Al Akhbar.
Selon le journal, c’est cette protection américaine qui «empêche les autorités judicaires occidentales de faire le suivi des différents dossiers [contre Salamé] dans plusieurs pays européens».
Et de citer les «autorités suisses qui refusent de répondre à la demande du parquet libanais spécialisé, datée du 26 janvier 2021, de bloquer les avoirs de Salamé».
Cette source relève la même attitude de la part des autorités allemandes et françaises.
«Riad Salamé fait l’objet d’enquêtes en France, pays dont il détient également la nationalité, et en Suisse pour détournement de fonds et blanchiment d’argent», rappelle le site d’information Libanews.
«Il est ainsi accusé d’avoir fait bénéficier certains de ses proches de 300 millions de dollars transférés par la Banque du Liban, même s’il semble pour l’heure profiter de la clémence de la justice libanaise, le procureur général de la république, le juge Ghassan Oweidat s’étant contenté de l’interroger à la demande de la justice suisse», poursuit la même source.
Selon Libanews, «Riad Salamé a refusé de se présenter devant la juge Ghada Aoun dans le cadre de l’enquête sur la manipulation du cours de la livre libanaise. Si elle est officiellement dessaisie, la juge poursuit aujourd’hui son enquête».
Al Akhbar précise qu’en septembre, les représentants de sept parquets se réuniront à La Haye, aux Pays-Bas, pour «unifier les mécanismes de travail sur le dossier Salamé» et qu’il devrait passer, une seconde fois, devant le juge libanais Jean Tannous.
MEE