Lors de sa visite à Constantine pour l’inauguration du nouveau siège de la cour, qui survient quelques jours seulement après le procès inédit de l’étudiant Walid Nekiche et les accusations portant sur les violations des droits des détenus, le ministre de la Justice a refusé de faire la moindre déclaration pour exprimer sa position sur cette affaire.
Très attendu par la presse jeudi dernier, à l’occasion de sa visite à Constantine pour l’inauguration du nouveau siège de la cour, le ministre de la Justice, Belkacem Zeghmati, a laissé tout le monde sur sa faim.
Lors de cette visite, qui survient quelques jours seulement après le procès inédit de l’étudiant Walid Nekiche et les accusations portant sur les violations des droits des détenus, le ministre a refusé de faire la moindre déclaration pour exprimer sa position sur cette affaire, qui a défrayé la chronique judiciaire et a été largement médiatisée, malgré l’insistance des journalistes présents.
Il a fallu attendre la présentation du bilan des activités de l’année judiciaire au nouveau siège de la cour de Constantine pour que le ministre lâche finalement : «Le plus important dans ce volet des procès, je le dis, je le répète et je persiste, c’est que la loi a garantit tous les droits de l’accusé ainsi que ceux des avocats. Ceci, contrairement à ce qui est en train de se dire, de ce qui a été dit et tout ce qui a été écrit sur les violations des droits. Ce n’est pas vrai ! La loi a pris en considération tous les aspects et les preuves sont claires. La défense constituée a le droit d’assister l’accusé lors de sa présentation devant le juge et a le droit d’être présente dans les institutions pénales.» Pour éviter toute autre question des journalistes ou d’être appelé à donner d’autres précisions, le ministre a refusé catégoriquement d’animer un point de presse, comme cela se fait d’habitude lors de ces visites.
Des administrations insubordonnées
Apparemment gêné par cette affaire, Belkacem Zeghmati ne s’attendait visiblement pas à une situation plus qu’inédite encore en apprenant, lors du même exposé, que le guichet unique de la justice à Constantine a délivré 97 600 extraits du casier judiciaire n°3 et 85 975 actes de nationalité en une année.
Un fait qui lui fera piquer une vive colère. «Le gouvernement a pris une décision et le Premier ministre a signé un décret exécutif interdisant à l’administration de demander un extrait de la nationalité et le bulletin du casier judiciaire, seulement dans des cas exceptionnels. Quelle interprétation peut-on accorder à ce comportement ?» dira-t-il sur un ton nerveux.
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Et de fulminer : «Est-ce que l’administration est contre les décisions de l’Etat ? Est-ce que l’administration s’insurge contre l’Etat ? La loi est claire et elle existe dans le Journal officiel, comment l’administration affirme aux citoyens qu’elle n’a pas reçu de notes officielles dans ce sens ? C’est quoi ces manières ? L’administration est en train de semer le doute entre le citoyen et l’Etat, et c’est quelque chose de très dangereux et inacceptable.»
Le ministre, qui a exprimé clairement son ras-le-bol face à ce genre de comportements, a affirmé que tout responsable qui ose demander ces deux documents fera l’objet de poursuites judiciaires.
Un projet de réforme du tribunal criminel
Le premier responsable du secteur a annoncé également, lors de cette visite, le lancement d’un projet de réforme du tribunal criminel. Un volet estimé par le ministre de très délicat et sérieux, qui nécessite une révision de sa gestion et de son organisation.
M. Zeghmati affirme que le dossier de ce projet a été débattu par tous les intervenants du secteur de la justice, notamment les avocats et les professeurs universitaires. «Il n’y a pas eu de consensus sur deux points concernés par cette révision, à savoir la composante du tribunal criminel et le recours contre le jugement. Mais en parallèle, il y a eu un accord sur la question du recours des jugements», a-t-il dit, s’interrogeant sur l’utilité du recours, qui nécessite des sommes colossales, surtout que 99% des verdicts approuvent le premier jugement. Pour le ministre de la Justice, il s’agit de dépenses publiques énormes et inutiles dans la gestion du tribunal criminel qui causent des pertes énormes au Trésor.
Selon ses dires, l’argent déboursé sans résultat est considéré comme un acte de dilapidation de l’argent public. «Nous vivons aujourd’hui une sérieuse crise financière, ressentie par le citoyen. L’argent public est sacré, tout comme la liberté de l’individu. Si on perd l’argent public, on perdra l’Etat et on perdra la liberté et l’autonomie. Il faut inculquer la culture de la préservation de l’argent public aux gens», a déclaré M. Zeghmati, qui a annoncé également la préparation d’un colloque international sur ce sujet avec la participation d’experts des pays ayant le même système juridique que l’Algérie.
En conclusion, le ministre a dévoilé le projet de création de quatre tribunaux régionaux de recours. Ils seront installés à Constantine, Oran, Alger et Ouargla. Le dossier est au niveau du secrétariat général du gouvernement pour étude.