La presse espagnole de droite accentue la pression sur la ministre des Affaires étrangères sur les circonstances de l’entrée de Brahim Ghali en Espagne, apportant de nouvelles révélations attestant de sa responsabilité directe dans les privilèges accordés au chef du Polisario le 18 avril à la base de Saragosse.
Vozpopuli, proche de Vox, signale ce samedi qu’Arancha Gonzalez a entouré l’arrivé de Ghali en Espagne par une chape de plomb. Seuls quelques privilégiés en étaient informés. La publication indique que la n°2 du ministère des Affaires étrangères, la secrétaire d’Etat Christina Gallach, qui avait convoqué l’ambassadrice du Maroc suite aux déclarations de Saad-Eddine El Othmani sur la marocanité de Ceuta et Melilla, n’était pas au courant de l’accueil de Ghali. L’ambassadeur espagnol à Alger, Fernando Morán, ainsi que la directrice générale de la division Maghreb, Eva Martinez, ont été également maintenu à l’écart, explique la même source.
Interrogé sur ces «précautions» prises par Arancha Gonzalez, l’Office d’information diplomatique (OID), relevant de ses prérogatives, a éludé une question de Vozpopuli sur ce sujet. «Nous pouvons vous dire que toutes les personnes qui avaient besoin de savoir le savaient, conformément au principe de base du “Need to know”», a répondu l’OID.
Lâchée par sa collègue socialiste à la Défense
le média El Español, proche de la droite, a accusé de son côté la cheffe de la diplomatie d’avoir «violé le code Schengen de l’Union européenne et ses propres règles pour laisser entrer Ghali en Espagne», précisant que «les diplomates sont dispensés du contrôle douanier de leurs bagages, mais ne peuvent en aucun cas se soustraire au contrôle des passeports».
Cette offensive coordonnée intervient en réponse aux déclarations de la ministre des Affaires étrangères sur cette affaire. Dans une interview accordée, jeudi soir à la Radio Nationale d’Espagne, elle affirme que l’accueil de Brahim Ghali a respecté à la «lettre» les normes établies. Les passagers d’avions officiels, comme c’est le cas pour celui ayant transporté Ghali «doivent s’identifier avant d’entrer et cela doit être notifié aux autorités diplomatiques compétentes afin que les procédures pertinentes soient facilitées à leur arrivée dans notre pays», a soutenu Mme. Gonzalez.
Une sortie qui n’a pas convaincu la classe politique et la justice. Hier, l’avocat Antonio Urdiales a demandé au juge d’instruction Rafael Lasala d’exiger des explications au ministère des Affaires étrangères sur les ordres donnés au ministère de la Défense pour que le chef du Polisario soit dispensé du protocole traditionnel de contrôle de son passeport à la base de Saragosse.
Cette affaire fragilise davantage Arancha Gonzalez. Sa gestion de l’entrée de Brahim Ghali n’a pas eu l’adhésion des autres membres du gouvernement, notamment les ministres régaliens du PSOE. Si au début de la crise, la presse ibérique avait fait état de l’opposition du ministre de l’Intérieur à l’accueil du chef du Polisario, c’est au tour désormais de sa collègue à la Défense de prendre ses distances. Margarita Robles a affirmé, hier, que son département «n’a aucun type de compétence» dans la réception d’un «avion d’Etat», renvoyant ainsi la balle dans le camp de Mme. Gonzalez.
Mme. Robles vient ainsi appuyer les réponses du général Cañabate aux questions du juge Lasala. Le militaire avait affirmé, la semaine dernière, que sur ordre du ministère des Affaires étrangères reçus par l’état-major de l’armée de l’air, le personnel de l’avion de la présidence algérienne avec à son bord Brahim Ghali «n’ont pas subi le traditionnel contrôle des passagers à la frontière». Le général a indiqué que le département d’Arancha Gonzalez n’a pas facilité aux militaires l’accès à l’identité du chef du Polisario et de son compagnon.
Pour l’heure, les médias, l’opposition de droite et la justice se focalise sur Arancha Gonzalez, laissant de côté la responsabilité du chef de l’exécutif, Pedro Sanchez. Pourtant, en réponse aux incursions de Pablo Iglesias sur les dossiers du Sahara occidental, la Bolivie et le Venezuela, Mme. Gonzalez a maintes fois répété que la politique étrangère du gouvernement espagnol est définie par le président et la ministre des Affaires étrangères.