Le rapport Stora relatif à la question mémorielle entre l’Algérie et la France continue de susciter des réactions. Hier, l’Organisation nationale des moudjahidine (ONM), par le biais de son secrétaire général par intérim, Mohand Oumar Benelhadj, a critiqué son contenu, jugeant que celui-ci a « montré ses limites».
L’Organisation nationale des moudjahidine (ONM) n’a pas apprécié le contenu du rapport élaboré par l’historien Benjamin Stora concernant la question mémorielle et remis le 20 janvier dernier au président français, Emmanuel Macron.
Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, le secrétaire général par intérim de l’ONM, Mohand Ouamar Benelhadj, a indiqué que ce document a « occulté » les crimes coloniaux, se contentant de «célébration symbolique».
Allusion faite bien entendu à l’absence de (DEMANDE DE) « pardon » dans les «préconisations» énumérées par Stora dans son rapport qui, selon Mohand Ouamar, a «montré ses limites». Le SG par intérim de l’Organisation des moudjahidine va même jusqu’à supposer que le rapport en question a été « imposé » à Stora, pour des raisons politiques.
Et ce, parce que l’historien, dans de précédents écrits, a évoqué à maintes reprises «le côté obscure de l’histoire coloniale», alors qu’«il a omis d’aborder dans son rapport les différents crimes coloniaux perpétrés par l’État français, de l’aveu des Français eux-mêmes». «Benjamin Stora a évité d’évoquer la genèse du problème mémoriel entre les deux pays qui remonte à 1830, lorsque Charles X a envoyé son armée en Algérie pour la coloniser, piller ses richesses et exterminer son peuple», a-t-il encore ajouté, avant de rappeler les «enfumades, massacres et épidémies ayant décimé des millions d’Algériens».
Des meurtres réduits, poursuit Mohand Ouamar Benelhadj, « dans l’assassinat de Ali Boumendjel en appelant à une célébration commune de cet événement pour clore le dossier mémoire».
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Pour celui-ci, « le fait d’écarter toute possibilité d’excuses de la part de la France officielle pour ses crimes coloniaux est de nature à torpiller les tentatives de réconciliation avec la mémoire ». « Les Algériens n’attendent pas de l’Etat français une indemnisation financière pour les millions de vies, mais l’appellent à reconnaître ses crimes contre l’humanité », va-t-il lancé.
Il est à rappeler que dans son rapport, entrant dans le cadre du règlement de la question mémorielle, Benjamin Stora a énuméré un nombre de recommandations, principalement la constitution d’une commission « Mémoire et Vérité » qui aura comme tâche d’« impulser des initiatives communes entre la France et l’Algérie sur les questions de mémoires». Elle se penchera, entre autres, sur « des travaux sur les essais nucléaires français dans le Sahara et leurs conséquences, ainsi que celles de la pose de mines antipersonnel durant la guerre ».
Il est question aussi de la « publication d’un guide des disparus algériens et européens pendant le conflit», comme elle tentera d’«avancer sur la question des archives, avec comme objectifs le transfert de certaines archives de la France vers l’Algérie, et d’autre part permettre l’accès aux chercheurs des deux pays aux archives françaises et algériennes ; processus plus rapide de classification des documents secrets». Stora a aussi évoqué les « déplacements des harkis et de leurs enfants entre la France et l’Algérie ».
Mais, l’éventualité que la France puisse formuler « des excuses » n’a nullement été mentionnée. « On sait que depuis plusieurs années les autorités algériennes réclament des excuses à propos de la période de la colonisation. Dans la lignée des discours présidentiels français précédents, ce geste symbolique peut être accompli par un nouveau discours. Mais est-ce que cela sera suffisant ? N’est-il pas nécessaire d’emprunter d’autres chemins, de mettre en œuvre une autre méthode pour parvenir à la réconciliation des mémoires ?» a d’ailleurs écrit Stora dans son rapport. Et c’est justement ce qui a été le plus critiqué du côté algérien, même si, pour l’heure, les autorités n’ont pas encore réagi.
Nommé en même temps que Stora, en juillet dernier, Abdelmadjid Chikhi, qui est le vis-à-vis de l’historien français dans ce travail, n’a pas encore remis de rapport à la présidence de la République.
Même si Abdelmadjid Tebboune avait estimé, au mois de juillet dernier, que la question doit être traitée « loin de toute crispation politique et exploitation politicienne», il n’en demeure pas moins que les Algériens s’attendent principalement, de la part des autorités françaises, à «des excuses officielles» pour les crimes commis, sous leursdifférentes formes.