Des dizaines de manifestants arrêtés vendredi dernier ont comparu ce dimanche devant les tribunaux de différentes juridictions. Les audiences ont parfois duré jusque tard dans la nuit, comme ce fut le cas au tribunal de Bab El Oued. Verdict : 44 citoyens au total ont été mis en détention.
Le décompte a été réalisé par l’infatigable Zaki Hannache, ce militant qui, depuis presque deux ans maintenant, suit scrupuleusement l’actualité judiciaire du mouvement de contestation populaire. «44 mandats de dépôt et 91 citoyens devant le procureur de la République. Taux le plus élevé depuis le 21 juin 2019», fera remarquer le défenseur des détenus d’opinion dans une publication sur les réseaux sociaux, ajoutant que «la garde à vue de six personnes arrêtées, dont une journaliste, a été prolongée».
De fait, notre consœur Kenza Khatto n’a toujours pas été auditionnée par le parquet. «La garde à vue de la journaliste Kenza Khatto prolongée de 24 heures», a confirmé Radio M, le média où elle travaille. Ainsi, de toutes les personnes arrêtées le vendredi 14 mai, curieusement, c’est la seule à ne pas avoir été entendue par le procureur. Notre amie se trouve toujours au siège de la sûreté de wilaya d’Alger, boulevard Amirouche (commissariat central). Elle devrait être auditionnée aujourd’hui par le procureur de la République près le tribunal de Sidi M’hamed. Dressant une synthèse des présentations et des décisions en comparution immédiate rendues ce dimanche, le Comité national pour la libération des détenus (CNLD) a indiqué que «44 personnes ont été placées sous mandat de dépôt en une seule journée (16 mai 2021) dans 6 wilayas».
A Alger, cette mesure a concerné 6 personnes sur les 13 qui ont été déférées devant le tribunal de Sidi M’hamed, et 7 prévenus sur les 35 qui ont été jugés en comparution immédiate par le tribunal de Bab El Oued (domicilié à Baïnem). Retenons à ce propos qu’un citoyen, Mourad Mohamed, a été condamné à 18 mois de prison ferme avec mandat de dépôt, tandis que six autres ont été condamnés à un an de prison ferme avec mandat de dépôt.
Parmi eux : Ouahid Benhalla, membre du bureau national du MDS, «arrêté vendredi 14 mai 2021 juste à sa descente d’un bus !» s’étonne le CNLD. «Benhalla Ouahid, membre du bureau national du MDS, condamné à un an de prison ferme avec mandat de dépôt. Pouvoir criminel !» s’est indigné pour sa part Fethi Ghares, porte-parole du MDS, sur sa page Facebook.
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Toujours au tribunal de Bab El Oued : 24 autres prévenus ont écopé, quant à eux, d’une peine de six mois de prison ferme sans mandat de dépôt. Dans le lot : deux figures de proue du hirak étudiant : Imili Imane Abdelli et Abderrahmane Djaber Righi. Enfin, le tribunal a prononcé la relaxe en faveur de trois citoyens.
Au tribunal de Sidi M’hamed, le procès de 13 personnes a été renvoyé, avec mise sous mandat de dépôt de six manifestants. Les procès sont prévus les 23 et 24 mai.
A Sétif, 24 personnes, qui avaient été interpellées lors des manifestations réprimées du hirak, au deuxième jour de l’Aïd, ont comparu devant le tribunal correctionnel ce dimanche. Sur les 24 prévenus, 22 ont été placés sous mandat de dépôt. D’après une information publiée sur la page Facebook du Collectif des avocats des détenus d’opinion, les 22 manifestants ont été condamnés à 1 an de prison ferme et 60 000 DA d’amende avec mandat de dépôt.
Parmi les condamnés : un éminent universitaire, Larbi Rabdi, «professeur de langue et littérature françaises à l’université Lamine Debaghine de Sétif, diplômé de l’université Paris Sorbonne, titulaire de deux doctorats en langue française et en langue et littérature amazighes. A Bordj Bou Arréridj, 13 manifestants ont été condamnés à 1 an de prison ferme, parmi eux, 5 ont été placés sous mandat de dépôt, selon Zaki Hannache.
A Annaba, deux activistes, Achraf Mouissi et Hassan Aouadi, interpellés vendredi et placés en garde à vue, ont été mis en détention, nous apprend le CNLD. Leurs procès sont renvoyés respectivement au 24 et 31 mai. Un troisième manifestant, Berrezak Amor, a été déféré devant le juge d’instruction. A Chlef, la même source indique que le citoyen Hamza Foudad, «arrêté vendredi 14 mai 2021 à sa descente du train juste après son retour d’Alger», a été auditionné hier par le procureur de la République près le tribunal de Chlef, qui l’a traduit devant le juge en comparution immédiate.
A Tiaret, le citoyen Khalil Nouar, arrêté lui aussi lors de la marche avortée de vendredi, a été entendu hier par le procureur de la République qui a transmis ensuite son dossier au juge d’instruction. «Une perquisition au domicile familial de Khalil Nouar a été effectuée samedi 15 mai», affirme le CNLD.